Âge d’or pour le métal jaune. Pour combien de temps encore ?

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En août dernier, le cours de l’or a pour la première fois franchi le cap des 2.000 dollars l’once – soit environ 31 grammes. Et dire qu’en 2015, le métal noble se négociait à un seuil historique de 1.000 dollars l’once. Même s’il a doublé sa valeur en cinq ans, le cours de l’or pourrait encore nous surprendre : certains investisseurs s’attendent à ce qu’il atteigne de nouveaux sommets. Un avis que partage entre autres Arnaud du Plessis, investisseur professionnel en or et mines d’or pour le gestionnaire de fonds Amundi.

Après la forte croissance enregistrée ces dernières années, ne pensez-vous pas que le cours de l’or va retomber ?

ARNAUD DU PLESSIS « Un recul ou une stabilisation, comme nous l’avons observé ces derniers mois, c’est tout à fait normal et même bénéfique. Je pense pourtant qu’il est fort probable que le cours de l’or continue à grimper. En ce qui concerne les mines, les perspectives sont encore meilleures : malgré le prix élevé de l’or, elles sont toujours bien en dessous de leur niveau le plus élevé.»

Warren Buffet semble du même avis : il a récemment acheté des actions de Barrick Gold, une des plus grandes mines d’or au monde. Un fait étonnant quand on sait que Buffet n’a jamais montré le moindre intérêt pour l’or en tant qu’investissement.

DU PLESSIS « Pour moi, cela illustre deux choses. Premièrement, le fait que Buffett estime lui aussi que la hausse de l’or repose sur des fondations solides. Deuxièmement, que le potentiel des mines est encore plus prometteur. »

Quelles sont exactement ces « bonnes fondations » pour la hausse de l’or ?

Nous sommes dans un contexte où les taux sont bas. Et on s’attend à ce que cette situation se prolonge encore un long moment. Le rendement des obligations d’État américaines à long terme s’élève encore à 0,7 %, soit moins que le taux d’inflation. Le taux réel, c’est-à-dire le taux de rendement après inflation, est donc négatif. Confrontés à une perte de leur pouvoir d’achat, les investisseurs en obligations à long terme cherchent des alternatives. Et l’or est une des options. Un tel placement ne génère pas de rendement, mais il a la réputation de suivre l’inflation sur le long terme. Dans le passé, l’évolution du cours de l’or s’est toujours parfaitement alignée sur celle du taux réel.

Une remontée des taux serait donc négative pour le cours de l’or ?

En effet. Mais c’est le scénario inverse qui semble se produire. Récemment, la Banque Centrale Américaine a annoncé qu’elle visait désormais une inflation modérée plutôt que de chercher à intervenir directement au cas où l’inflation dépassait les 2%. Cela augmente la probabilité d’une nouvelle descente du taux réel dans le négatif, ou du moins d’un taux qui reste faible sur le long terme. Conséquence : cela soutiendra le cours de l’or.

Investir une petite partie de son portefeuille dans l’or est considéré comme un placement défensif. Or, la plupart des fonds d’investissement investissent essentiellement dans les mines d’or. S’agit-il également d’un risque faible ?

DU PLESSIS « Non. Les cours des actions des mines d’or sont beaucoup plus volatils que ceux de l’or. On observe même un facteur de deux à trois sur le long terme. C’est très réjouissant quand le cours de l’or grimpe, mais aussi particulièrement fâcheux quand il chute. Investir dans les mines d’or demande donc un bon appétit pour le risque. Il faut d’ailleurs noter que les mines n’ont pas encore tout à fait assimilé la tendance haussière actuelle. Mais cela ne saurait tarder, je pense. »

Pourquoi ?

DU PLESSIS « Car la donne est encore meilleure qu’il y a cinq ans. À cette époque, le cours de l’or s’est effondré à 1.000 dollars et la plupart des mines étaient déficitaires. Elles ont donc beaucoup travaillé sur leur efficacité ces dernières années. Le coût moyen de l’extraction d’or a également fortement diminué aujourd’hui. Il faut compter en moyenne environ 1.200 dollars pour extraire une once d’or, soit beaucoup moins que le prix auquel l’or se négocie. Les mines sont donc extrêmement rentables. »

Qu’en est-il des risques géopolitiques des mines d’or ?

DU PLESSIS « À une époque lointaine, beaucoup de mines d’or importantes se trouvaient dans des régions instables, ce qui constituait effectivement un risque. C’est en partie pour cette raison que l’industrie s’est plus tournée vers les mines situées en Amérique du Nord et en Australie. Ce sont d’ailleurs dans ces mines principalement que nous investissons. »

Les mines d’or ont mauvaise presse en ce qui concerne la pollution environnementale. L’extraction d’or est-elle une activité néfaste pour l’homme et le climat ?

DU PLESSIS « Travailler avec des produits chimiques et des acides comporte des risques. Il est vrai aussi que les mines « à ciel ouvert » (c’est-à-dire où le sol est creusé) laissent des cicatrices sur le paysage. Mais les mauvaises pratiques sont surtout liées aux mines illégales, dans les régions instables. L’industrie occidentale de l’extraction d’or est de plus en plus consciente de la nécessité de limiter son impact sur l’environnement. Et je vous rassure : les mines d’or occidentales cotées en Bourse font partie des meilleurs élèves de la classe. »

Arnaud du Plessis, Amundi.

Disclaimer : Les informations contenues dans cette publication constituent un commentaire général sur la situation financière actuelle et ne doivent pas être considérées comme un conseil ou une recommandation concrète en matière de produits financiers.