Le sens et le non-sens du bitcoin : tout ce qu’il faut savoir

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Le bitcoin est-il le nouvel or numérique ou une bulle géante ? Le fait est que le phénomène suscite des émotions sur les marchés financiers et bien au-delà. Le monde semble être divisé entre les croyants et les non-croyants. Et Elon Musk peut faire chavirer le marché avec un seul tweet bien ciblé. Nous avons demandé à Bart Abeloos de Crelan et à Katrien Pottie d’Amundi ce qu’il en était.

Le bitcoin, c’est quoi exactement ?

Bart Abeloos: «  C’est une crypto-monnaie, une devise numérique. Les crypto-monnaies sont basées sur des algorithmes et utilisent le protocole de la blockchain. La blockchain est une technologie de stockage et de transmission d’informations transparente et sécurisée. Pour le dire simplement, c’est une base de données sécurisée et distribuée qui contient l’historique de tous les échanges effectués entre ses utilisateurs depuis sa création. Les transactions sont stockées dans des ordinateurs et protégées par la cryptographie. »

Katrien Pottie: «  C’est une unité de paiement, comme l’euro. Il a été conçu pour effectuer des paiements par voie électroniquement directement d’une personne à une autre, sans devoir passer par une banque commerciale et sans être contrôlé par une autorité centrale ou une banque centrale. C’est une devise qui n’est liée à rien ni à personne et dont la valeur dépend de ce que veulent lui accorder les investisseurs. »

Qu’est-ce qui fait le succès du bitcoin ?

Katrien Pottie: « Au départ, le bitcoin était le terrain de jeu de quelques initiés, car il permet de transférer très rapidement de l’argent d’un point A à un point B en toute sécurité. Ensuite, les professionnels de la finance ont commencé à s’y intéresser. Ark Invest, plutôt spécialisé dans les fonds spéculatifs, ainsi que BlackRock et Fidelity Investments (de grands gestionnaires d’actifs) ont rendu certains de leurs portefeuilles accessibles au bitcoin. Des entrepreneurs de renom, comme Elon Musk (le fondateur de Tesla), ont fait la promotion du bitcoin. De plus en plus de sociétés ont également permis d’utiliser la crypto-monnaie comme moyen de payement. Les petits investisseurs ont suivi et, aujourd’hui, il existe d’innombrables millionnaires en bitcoins. »

Bart Abeloos: « Ces derniers ont l’avantage de posséder un investissement sur lequel aucun impôt n’est prélevé. Parce que, comme nous l’avons dit, il n’y a pas de régulateur. »

Le bitcoin est parfois appelé le nouvel or

Bart Abeloos: « Dans un contexte où les marchés boursiers traditionnels sont de plus en plus chers, certains considèrent, en effet, le bitcoin comme une valeur refuge, le bitcoin étant limité à 21 millions de tokens. De plus, les marchés ont été inondés par la monnaie hélicoptère (en référence aux images de la création monétaire illimitée évoquée par l’ancien président de la Fed, Ben Bernanke, ndlr), ce qui rend le bitcoin particulièrement attractif en raison de sa rareté. Un peu comme l’or, qui est également un investissement rare dont l’offre est limitée. »

 Si les banques centrales proposent leurs propres crypto-monnaies, la bulle pourrait exploser 


« Seulement voilà : derrière le prix de l’or, il y a une matière première, alors que derrière le bitcoin, il n’y en a pas. Notons que derrière le bitcoin, il y a des mineurs aussi. Le fait d’intégrer les transactions dans un bloc, de contrôler qu’elles ne sont ni altérées ni falsifiées et de les consigner dans un registre, s’appelle le minage. Pour ce faire, les mineurs ont besoin d’énormes ordinateurs qui permettent toutes ces transactions cryptées de la blockchain. »

L’extraction du bitcoin est-elle nuisible pour l’environnement ?

Bart Abeloos: « Selon une étude récente de l’université de Cambridge, la crypto-monnaie consommerait autant d’électricité qu’un pays comme la Pologne. Le problème est que la majorité des bitcoins sont minés en Chine avec de l’énergie produite par de vraies mines de charbon. »

Katrien Pottie: « C’est aussi la raison du volte-face d’Elon Musk : Tesla n’accepte plus cette monnaie comme moyen de paiement. L’impact environnemental est également l’une des raisons pour lesquelles le management d’Amundi n’a jamais voulu intégrer les bitcoins dans son portefeuille. Notre objectif étant de transformer toute notre gamme en fonds durables pour fin 2021, ce serait contradictoire voire hypocrite de nous tourner vers le bitcoin. En tout cas, tant que cette pollution persiste. »

Est-ce le volte-face d’Elon Musk qui a fait chuter le prix du bitcoin dernièrement ?

Katrien Pottie: « C’est ce que certains ont avancé, mais c’est accorder un peu trop de pouvoir au patron de Tesla. Les raisons sont multiples. Tout d’abord il y a la crainte d’un retour de l’inflation, qui provoque de la volatilité sur les marchés et des prises de bénéfices. N’oublions pas que les marchés sont passés d’un record à l’un autre et que les arbres ne poussent pas jusqu’au ciel. Ensuite, la Chine a été confrontée à une panne d’électricité en Chine, qui a fortement affecté le mining. »

Bart Abeloos: « De plus, il y a la résistance des gouvernements et des banques centrales. Très récemment, le gouvernement chinois, dans un effort pour garder le contrôle, a interdit l’exploitation minière, même si le pays ouvre les trois quarts de la production mondiale. Le bitcoin est également interdit en Turquie depuis cette année. Christine Lagarde, présidente de la BCE, et Janet Yellen, secrétaire au Trésor américain, se disent inquiètes de l’utilisation du bitcoin pour le financement et le blanchiment d’activités criminelles. La Banque centrale européenne prévoit de créer un euro numérique, et la Chine et les États-Unis envisagent également d’émettre une monnaie numérique. Ce sont autant de raisons qui expliquent la baisse du prix. »

Et qu’en pensez-vous chez Amundi et Crelan ?

Katrien Pottie: « Notre CIO a récemment qualifié le bitcoin de ‘farce’. Dans l’un de nos derniers rapports de recherche, Amundi rejette l’idée de pouvoir considérer le bitcoin et les autres crypto-monnaies comme une forme de monnaie ou réserve de valeur. Les régulateurs vont, selon notre CIO, mettre fin à la bulle, lorsque les banques centrales développeront leurs propres monnaies numériques. »

Bart Abeloos: « Du point de vue de l’investissement, le problème avec le bitcoin est que, comme il a été souligné précédemment, il n’a pas de valeur intrinsèque. Alors que l’or a une histoire séculaire en tant que ‘valeur refuge’, le bitcoin a un historique très court et erratique en comparaison. Un deuxième problème est que les propriétés du bitcoin ne sont pas encore bien connues. Est-ce une bonne couverture contre l’inflation ? Peut-on considérer la crypto-monnaie comme une diversification contre les turbulences du marché boursier ? Comment le comportement du bitcoin est-il corrélé à celui d’autres classes d’actifs dans différentes conditions de marché ? Nous ne le savons pas aujourd’hui. Notre rôle est de préserver et/ou de faire croître les portefeuilles de nos clients en fonction de leur profil d’investisseur. La volatilité du bitcoin et ses risques mal compris le rendent particulièrement inadapté pour la plupart des portefeuilles de nos clients. Chi va piano, va sano e lontano, comme le disent nos amis italiens. Qui va lentement, va sainement et va loin. C’est l’approche que nous privilégions chez Crelan. »

Bart Abeloos et Katrien Pottie apportent leur éclairage sur des sujets d’actualité au sein des marchés financiers. Ils développent également la question des prix alimentaires qui atteignent un niveau record et leurs conséquences pour les consommateurs. Découvrez ici pourquoi les prix des produits alimentaires explosent.

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